vendredi 30 avril 2010

un ciel tellement bleu qu'il en frise tes pupilles d'électricité


Vendredi, j'ai été dans un vernissage en appartement. Un artiste exposait les lettres qu'il adresse chaque jour depuis une dizaine d'années au premier ministre du Canada. Parfois il écrit en français lorsque le ministre en question est francophone ; parfois en anglais lorsqu'il est anglophone. Principalement, l'artiste raconte sa vie au premier ministre. Par exemple, quand il a eu un enfant, Jean Chrétien a été l'un des premiers à le savoir. En dix ans, soit environ 3000 lettres envoyées, on a du lui répondre seize fois par un accusé de réception. Un travail sur la solitude du citoyen.

Dans ce vernissage, j'ai retrouvé Bingo et Roberto Parodi et j'ai rencontré le frère de Roberto Parodi qui réalise un film d'horreur en ce moment. On a parlé de films d'horreurs (street trash). On a bu de la Belle Gueule Blonde d'Été. On a fumé de l'afghan roulé en petit boudin. On est sorti sur le balcon.

Un type blond aux yeux vraiment très bleu et à la cervelle vraiment très excitée s'amusait à parler aux gens en plaquant son visage contre le leur, fixant ses yeux bleu dans ceux des autres quelque soit leur couleur. Au bout d'un moment, Bingo a fini par disparaître. Je suis resté à errer pendant un moment. Puis, alors que j'allais partir, j''ai retrouvé Roberto Parodi et le type aux yeux bleu. On s'est jeté dans un taxi et on a filé vers le nord de la ville.

Dans le nord, on a découvert une dizaine de personnes. Certaines assises sur un tabouret, accoudées au comptoir buvant un litre de Molson, certaines carrément endormis sur leurs chaises, certaines englués face à des machines à sous comme des moustiques fasciné par un marais multicolore. Je me suis assis à une table avec Roberto Parodi et on a encore discuté de Jacques Vergès. Quelque écran diffusait un top 10 des plus beaux buts du Canadien ( les" Canadiens", c'est l'équipe de hockey de Montréal) ou peut-être la météo. Les yeux bleu, après avoir longuement discuté avec un type en jogging d'une quarantaine d'année, sont revenu à notre table et nous ont gentiment offert un petit paquet vert transparent à moitié remplit de cocaïne. On est parti chacun notre tour aux toilettes. Peu après, on s'est mis a avoir de véritables discussions pleine d'assurance mais tachetés de confessions plus ou moins intimes jusqu'à ce que l'on décide de faire un baby foot ( dans cet ordre). J'ai mis un but, mais je ne sais plus qui a gagné. Ensuite, on a recommencé un cycle de discussion assurées et violemment intimes ( des phrases comme : " je t'aime " jaillirent de certaines de nos bouches ( à ce moment là, nous avions tous plusieurs bouches), sortant de temps en temps pour fumer une clope. Avec Roberto Parodi, on a fini nos paquets respectifs sur le trottoir en trempant une clef directement dans le petit paquet plastique ( je ne connaissais pas cette technique ( je ne prends pas souvent de cocaïne, je trouve que c'est une drogue de psychanalyste ( mais c'est pratique cette technique )). Les yeux bleu ont encore couru derrière le jogging de quarante ans et on a fini par rentrer à pieds vers six heures du matin en mangeant des double-cheese que l'on avait acheté dans un mac do qui ne ferme jamais et qui , à six heures du matin, semblait avoir subit l'affront d'une tornade malveillante ( ou alors, il ( le mac do) semblait s'être fait piétiner par une colonie de vacances géante ( en fait, dans ce mac do, on pourrait juste penser que les Huns existent toujours mais qu'il ne font plus cuire leur steak sous leurs selles )).

Le lendemain, Bonnita Troccoli m'a tiré du lit vers 10 heures et j'ai cru que j'allais vomir mais non. On a péniblement enfourché nos bicyclettes et on est parti retrouver Rigoberto McMillan et son pote Septimus T. Stevenson chez Rigoberto McMillan. On devait rejoindre la ville de La Pocatière, dans le plus-ou-moins Nord du Québec sur la rive sud du Saint-Laurent pour participer à une fête de thématique "Hillbilly ". Accroché au rétroviseur de la voiture de Septimus T. Stevenson, il y avait une cassette fondue :



On a quitté Montréal en se trompant de chemin et en dérivant au milieu des échangeurs autoroutiers. Une fois sortis de la ville, un camion nous a doublé :



et on s'est arrêté pour acheter de l'essence dans une station Gaz-O-Bar :



Le pompiste était enthousiaste :



et j'ai mis quelques coup de pieds dans le cul de Rigoberto McMillian pendant que Septimus T. Stevenson vérifiait l'huile :



On était plutôt joyeux et sensible ( nous avons été très touché par les couleurs locales :


)

Quatre heures plus tard, nous sommes arrivé à la Pocatière et nous avons été acheté de la bière, de la viande, des œufs et du bacon au supermarché du centre-ville. On ne quittait pas nos chapeaux :



et, à l'entrée du centre commercial, j'ai vu une petite annonce pour une course de rongeurs toute races confondues :



Ensuite on a fait la fête. De ma vie, je n'ai jamais autant écouté de musique country. Septimus T. Stevenson s'est petit à petit transformé en un genre de Bacchus, ventre-à-l'air / chemise-ouverte, hurlant de long monologue quand il ne chantait pas ( très bien) des chansons de Hank Williams Senior :



Rigoberto McMillian a joué de la batterie ( très bien ( il est important de préciser que Rigoberto avait choisi pour déguisement quelque chose d'indirectement relatif au thème Hillbilly : vêtu d'une simple camisole de force et d'un petit bonnet rond, il évoquait, pour moi, quelque chose d'un personnage de conte de noël, l'avare puni pour son avidité mais qui serait aussi un Billy des collines ( bizarrement, la camisole faisait penser à une chemise de nuit ))) et j'ai joué (un peu) d'un genre de basse campagnarde ( très moyennement ( je ne sais pas comment on appelle ce machin mais il y aura une photo à la fin de ce texte)). J'ai aussi discuté avec de jeunes agriculteurs locaux qui m'ont appris la guerre iroquoise — des embuscades principalement — et qui m'ont précisément renseigné sur le problème hygièno-nord-américain de production de fromage au lait cru. Je portais une perruque de cheveux gris, une salopette et une chemise à carreaux. D'autres était en pyjama de cow-boy. Bonnita Troccoli avait une salopette, une chemise à carreaux et un grand chapeau de quaker. Certains avait volontairement taché leurs habits de traces de terre ou de sauce à la tomate. La blague récurente de la soirée semblait être l'évocation d'une consanguinité possible entre nous tous. Les gens parlaient hillbilly-québécois et on nous conseillé de nous mettre des patates dans la bouche ou du sopalin afin d'atteindre la norme linguistique. On a chanté des chansons québécoises ( Plume Latraverse et d'autres que je ne connaissais pas). J'avais mon pyjama sous ma salopette et il m'est arrivé de devoir le remonter en dansant. On a dansé des gigues. On a sifflé et crié : " Yeeeeeeha ". Je tiens à préciser que l'on a tous plus ou moins vomi quelque part parce que l'on a tous plus ou moins bu trop vite ( sauf peut-être Septimus qui n'a rien dit de tel).

La soirée s'est terminé dans la confusion en ce qui me concerne. J'étais persuadé que ma femme Bonnita Troccoli voulait se taper le maître de maison, parce qu'il a une maison et qu'il adore faire des fêtes déguisé, passion qu'il partage avec Bonnita Trocoli, alors que chez moi, les fêtes déguisé, ce n'est pas vraiment naturel et que je n'ai même pas de maison où les faire. Il était derrière le comptoir du bar en train de discuter avec Bonnita. Je les ai rejoint. Je lui ai commandé une bière et très rapidement un jeune homme à la moustache à peine naissante, pas loin d'être prépubère, est arrivé. Il ( le maître de maison que l'on va appellé Morton Chung) nous as proposer de nous faire un cocktail et je n'ai pas pu refuser, emporté par l'enthousiasme des cheveux de mon voisin de bar qui s'est mis à secouer la tête en disant quelque chose comme : " yeah! " mais plusieurs fois de suite et en longueur comme : " yeah-yeah-yeaaaah! " et puis plus rien. J'ai regardé Morton Chung :



remuer son pyjama devant ma femme et ça me cassait passablement les couilles qu'elle laisse dépasser ce morceau d'épaule en faisant de l'œil à cet enfoiré qui était très certainement en train de me préparer un cocktail pour m'assommer et me piquer ma femme pendant mon sommeil.

Quand Morton Chung a eut fini de préparer sa potion, l'escogriff silencieux posé à mes côtés s'est mis à sautiller en disant quelque chose comme : : " Oh ! on est chôyé ( en faisant traîner le o circonflexe particulièrement QC ), tu nous chôôôôye mon pote " et j'ai n'ai pas pu m'empêcher de rigoler. Finalement, j'ai décidé que Bonnita Troccoli faisait ce qu'elle voulait et je suis partis fumé une clope sur la terrasse où j'ai tout de suite balancé mon cocktail dans l'herbe. J'ai pris une grande inspiration et, tandis que ces putains de banjo n'en finissait pas de grincer, j'ai éclaté de rire, j'ai bu un verre d'eau et je suis partis me coucher avant de devenir trop con. Finalement, j'ai mal dormis sur ma jalousie en maudissant les femmes et leurs épaules.

Le lendemain, on a glandé sur des chaises à bascule pendant une bonne partie de la matinée :



Ce pays de cocagne :



avait la particularité d'être planté en plein milieu d'autres maisons :



beaucoup plus " normales". Apparemment, les voisins s'accommodent des fêtes récurrentes et thématiques de Morton Chung. Vers 14h, Morton Chung nous as proposé d'aller voir-un-point-de-vue et on est monté dans sa voiture dont le siège du conducteur est retenu par un morceau de bois :



On est passé prendre un peu de bière au servi express qui vend aussi de la glace Klondike ( le Klondike est une région d'Alaska, la région de la deuxième ruée vers l'or, la région où Jack London a appris l'importance des allumettes) et on a vu, juste à côté du magasin, derrière le panneau publicitaire, une maison en bardeau de cèdre :



Puis on a repris la route en longeant une bosse qui — notre hôte nous l'apprendras en haut de la colline — est un reste de cailloux que les glaciers n'ont pas réussi à détruire lors de la fonte glaciaire qui a creusé cette vallée. Ce cailloux très dur porte un nom amérindien. Quelque chose comme monade-quelque chose :



On est descendu de la voiture au moment où la route est devenu un chemin de terre et on a commencé à marcher. De temps à autre, passait un quad ou une voiture :



C'était grand :


Les cailloux ressemblait à ça :



Puis on est arrivé au sommet de cette espèce de longue colline, on s'est assis et on a bu nos bières en regardant le paysage :



On a appris que tout le blé qui pousse dans ces champs sert à nourrir les vaches laitières des fermes de la région :



En arrivant à la maison, on retrouvé un type entre deux balançoires qui jouait du genre de basse que je ne saurais nommé :


et une poule-punk-roi-soleil :



Un train d'au moins trois kilomètres de long est passé dans le dos de Septimus T. Stevenson :



On a fini par reprendre la route en écoutant du blues de Louisiane et en parlant de ponceuse électrique :




Et le soleil s'est couché sur la cassette fondue :



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Le lendemain, il a neigé, -2 en température ressentie ( peut-être à cause du facteur vent), dix centimètres de neige, n'importe quoi.

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P.S : Avant de reprendre la route, on a longé le Saint-Laurent qui devient pratiquement une mer à partir de cet endroit. C'était splendide. Il y avait des oies qui volaient dans le bleu ciel, pas vraiment un groupe uniforme d'oies mais plusieurs petits groupes et parfois un grand groupe qui réussissait à tenir le V. Je sais que l'oie qui se retrouve à la pointe du V n'y reste pas longtemps. Il y a un relais d'oies parce que c'est très dur d'être à la pointe du V. La plupart du temps, les oies ne maintiennent pas le V et le V se disloque d'une manière un peu moléculaire, ou comme une colonne vertébrale , ou comme un scolopendre, ou comme une chaîne de vélo désarticulée. De petits points blanc et noir qui se déplacent tous ensemble, un peu comme un banc de poissons, avec des effets , disons, de réaction en chaîne, sur un ciel tellement bleu qu'il en frise tes pupilles d'électricité.

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