dimanche 30 mai 2010

Lac Ultra-léger



En ce moment, Montréal est Vert-Hulk


Tendance Jungle Urbaine



En botanomancie météorologique, si un peuplier se met à trembler, c'est que quelque chose va arriver :



Ce week-end, nous sommes partis affronter les Grands Espaces Nord-Américains. Pour une fois, c'est moi qui ait organisé l'affaire et comme je ne fais pas souvent ce genre de choses, et que , quelque part, j'avais quelque chose à me prouver, j'ai réservé ( pour le Samedi soir) une chambre dans un motel, et j'ai réservé ( pour le dimanche Soir) un Tipi à l'Auberge du Trappeur.

Vendredi soir, on a vu un combat dans un club de boxe d'amis d'amis et puis on est vaguement passés dans une fête, mais on a fini par se coucher tôt. Samedi matin on s'est levés à dix heures, alors qu'on avait prévu de bondir vers huit heures, et on a loué une Pontiac gris métalisé et on est parti vers 11h, sac de couchage et picnic dans le fond du coffre.

J'avais aussi prévu le trajet. On a pris l'avenue Sherbrooke, qui est une des avenues principales de Montreal et j'ai dit à Bonnita : " Sherbrooke ne s'arrête jamais, si on reste dessus, on arrive à Trois Rivières... C'est comme la rue de Rivoli qui va jusqu'à Caen ou Rouen ou je sais pas où-dans-la-mer en passant par la Défense; personne ne sait comment arrêter l'axe". On est sorti de l'île ( Montréal est une île) par l'extrême-Est en passant devant les raffineries de pétrole que je voulais voir depuis longtemps et puis on a continué à rouler sur la route 138, anciennement Sherbrooke-Est, qui était constellée de " vente de garage " :


Le vide grenier du samedi semble être un sport national qui se déroule chaque samedi le long de la 138. Mais ce n'est pas clair. Pourquoi se débarrasser de ses merdes en les vendant à son voisin qui lui-même les vendra la semaine prochaine à son voisin qui lui même, etc. ? En plus, le vendeur est souvent acheteur, alors pourquoi acheter des merdes à son voisin qui lui-même les a acheté à son voisin qui lui même, etc. ? Ces rotations d'antiquités sont sûrement un rituel bien plus social qu'écologique, nous sommes nous dit, en passant devant Chez Dan :


et nous avons croisé un résistant anti-social qui préfère décaper lui-même sa barrière plutôt que d'entretenir des logiques circulaires d'échanges d'objets


vu une mini-église


et une femme et son bouquet de fleurs


et, à un moment, alors que nous traversions une zone de pavillons respectables très nord-américains, des pavillons dont le jardin n'est fermé par aucune clôture, aucun buis, aucun portail, des pavillons dont le jardin est totalement ouvert sur la rue, on a vu, devant le garage de l'un d'entre eux, sur la pelouse impeccablement tondue de l'un d'entre eux, donc en pleine rue, en plein soleil, offert à la vue de tous, un couple de chiens, tous deux de la même race, des Golden Retriever je crois, deux chiens roux , grands, très poilus, pratiquement rouge tous les deux, qui baisaient comme des diables ou plutôt qui baisaient comme des chiens, c'est à dire bouche ouverte, langue dehors, regard fixe, et frénésie.


Arrivé à Trois Rivières, on a bifurqué vers la gauche en direction de Shawinigan ( prononcé Chaoui Ni Ganne), le bled où nous attendait notre motel. Mais, comme on n'a pas trouvé notre Motel, on a continué tout droit et on s'est retrouvés à l'entrée du Parc National de la Mauricie où on a été nous renseigner. Il était seize heures et un officier-garde-champêtre nous a judicieusement conseillé, habillé en short comme un adolescent couvert d'acné, puceau, et très enthousiaste, les chaussettes bien tendues sous son short beige ; ou alors habillé comme un chef scout quasi-hystérique, presque bondissant ; ou alors habillé comme un flic joyeux qui aurait trouvé une bonne planque.

Ce soir, nous devrions plutôt retourner vers le Motel et se promener dans Shawinigan qui est une très jolie ville, nous-a-t-il dit. Il est trop tard pour aller dans le parc et vous allez payer une entrée à 8 dollars pour rien.. allez-donc visiter Shawinigan, icitte [ de son doigt il pointa un endroit sur la carte qu'il était sur le point de nous offrir] vous pourrez voir un très beau p'tit point-de-vue, là, une très jolie p'tite promenade le long de la rivière Saint-Maurice, là-bas, une belle p'tite terrasse où prendre un café ... Et demain, vous pourrez louer un canœ icitte, à la fin du deuxième bassin du Lac Wapizagonke [ prononcer Ouapi Za Gonqué ] et aller jusqu'au bout du lac, en passant par Là Où Le Lac Se Ressert — là, un petit barrage de castors à admirer— et une fois arrivés au bout du lac, prendre une marche jusqu'aux chutes Waber et finir la boucle en passant par le chemin de portage qui relie le lac Wapizagonke et le Lac Anticagamac pour finalement reprendre le chemin dans le sens inverse et ramener votre canot vers 18h. Ça vous fera une bien belle p'tite journée de promenade, nous-a-t-il dit, en décollant ses yeux de la carte et en fixant un grand sourire sur son visage pâle.

On a dit d'accord.

Bonnita Troccoli est partie visiter le mini-musée du parc pendant que je fumais une clope en essayant de faire un lien entre l'hospitalité du garde-champêtre et la deuxième ruée vers l'or.*

Ensuite j'ai rejoint Bonnita Troccoli et j'ai ramassé deux prospectus. Le premier offrait la possibilité d'un week-end : " SENTENCE D'UNE NUIT ". Je cite : Venez en groupe expérimenter une ' sentence d'une nuit ' en prison : rituel d'incarcération, témoignage d'un ex-détenu, coucher en cellule, déjeuner du prisonnier. Réservé aux groupes de 15 à 39 personnes. Informations supplémentaire sur le site www.enprison.com

et le deuxième :



nous apprenait que les ours noirs sont opportunistes en ce qui concerne la nourriture et que placés en situation dite "d'attaque offensive" ( en situation "d'attaque défensive," il suffit de faire le mort), eh bien : [ vous pouvez toujours vous] enfuir ou trouver un refuge. Un véhicule ou une camionnette de camping vous procureront une certaine protection. Vous pouvez aussi grimper à un arbre, mais rappelez vous que l'ours noir peut aisément en faire autant. Si vous ne pouvez pas vous enfuir et que l'ours vous poursuit toujours, réagissez de manière agressive et essayez de l'intimider. Si cela ne réussit pas à l'éloigner, défendez-vous avec un objet à porter de main : un vaporisateur chasse-ours, un gros bâton, un couteau ou tout autre arme lui montreront que vous n'êtes pas une proie facile.

Et puis, on est repartis vers Shawinigan et on a fini par trouver notre Motel dont les chambres offraient de magnifique stores de Motel :


et un machin collé au mur


Il y avait aussi des barrière tordues


une porte d'entrée bleue


d'autres barrières tordues



et un air presque mexicain ou disons plutôt suisse/mexicain ( et un peu grec pour les couleurs et la décadence générale) flottait sur ce motel planté le long d'une nationale passante et commerciale :

On a pris une douche, déballé quelque affaires et nous sommes repartis vers Shawinigan et son centre-ville. Shawinigan semble être une ancienne ville ouvrière ( il y a un musée de l'industrie quelque part) et donne un peu l'impression de visiter une ville sur le point de devenir une ville fantôme :





où les boules de magasins d'ustensiles à Yoga se rapprochent comme si elles se sentaient seules


où les ruelles sont borgnes



où les enseignes tudors/antillaises ( tudor pour la typo; antillaise pour le diamant ( mais je dis ça comme ça ; ça pourrait très bien être gothique/mexicaine)


où les piscines sont vides


et les voitures des araignées



Mais c'est un endroit finalement assez agréable, comme une ville du nord de la France, ou un genre de Clermond-Ferrand, la ville où est né Raël, avec un ciel beaucoup plus grand :


et des feuilles beaucoup plus vertes


On a dîné d'un hamburger anglais tout à fait honnête et gentiment servi, et on est reparti vers le motel où nous nous sommes endormis devant une émission sur les tornades, les meurtres en séries et les accidents en tout genre ( à un moment il y a eu une vidéo improbable, un extrait d'une cassette de caméra de surveillance où l'on voyait un type qui essayait de braquer un épicier en faisant croire que son index tendu et caché sous un mouchoir blanc était une arme cachée sous un mouchoir blanc. Finalement, le type, un grand noir torse nu, se faisait plus ou moins mettre dehors par un petit chinois enragé qui ne s'était pas du tout laissé tromper par le doigt tendu et son mouchoir blanc ( l'émission était monté de telle sorte que l'on revoyait la scène en boucle dix fois de suite : le noir arrive, fait semblant d'acheter un jus de pomme, attends que la caisse soit ouverte pour montrer son doigt sous un mouchoir blanc au petit chinois qui, au début, est plutôt surpris, mais qui finit par sauter sur le grand noir en l'empêchant d'atteindre sa caisse et là, un vieux monsieur de type caucasien, présent dans le magasin à ce moment-là, met un coup de tabouret sur la tête du noir pendant que le chinois repousse le noir dehors, et puis ça recommence, l'index et le mouchoir puis le tabouret sur la tête du noir, puis le chinois saute sur le noir et le repousse loin de sa caisse enregistreuse, et encore une fois, re le doigt, le mouchoir, le tabouret, le chinois bondissant, de plus en plus vite, avec une séléction où seules images " chocs " des coups sur la gueule subsistent, jusqu'à ce que, merde, c'est complètement débile ce truc, éteins moi-ça, s'te plaît, ça m'excite les nerfs, c'est impossible de dormir devant un truc pareil, mes battements de cœur s'accélèrent, c'est automatique, c'est animal, c'est comme les jeux vidéos, je peux passer cinq jours sans dormir à cause des jeux vidéos, ce montage est complètement hystériogène, j'ai envie de tuer quelqu'un ou de sauter sur un grand noir ou de taper un chinois ou de défendre mon territoire alors que j'allais juste m'endormir, c'est impossible ce machin, ce oh-mon-dieu! permanent).

Le lendemain, on devait se lever à 8h mais j'avais mal réglé le réveil qui n'a jamais sonné alors on s'est levé à 8h45. On a fait nos bagages, mis les clefs dans la boîte à clef du motel et on a été m'acheter un jogging, un chapeau et de la crème solaire 50+ puis on a quitté Shawinigan sans manger. Arrivé aux abords du Parc Naturel de la Mauricie, on a pris un petit déjeuner canadien, des œufs, des saucisses, des fèves au lard, du jus d'orange, du café, dans le dernier restaurant avant la fin de la civilisation. Ensuite on est rentrés dans le parc par l'unique route qui traverse Maurice et qui ressemblait à ça :



et on a roulé pendant trente kilomètres avant de rejoindre l'endroit où nous attendait notre canot Grand-Mère ( il y a une ville qui s'appelle Grand-Mère au nord de Maurice). En ce qui me concerne, je portais un jogging large et bleu marine, une chemise noire sans manche et un chapeau de pêcheur vert kaki-foncé. Bonnita était vêtue d'une simple culotte, d'un soutien gorge à motifs fleuris et de lunettes de soleil rouge. On était trop cool pour les gilets de sauvetage, que nous avons laissé flotter dans le fond du canot. On était pas les seuls à quitter la civilisation et pour semer les autres êtres humains qui pagayait devant nous, on a traîné un peu au milieu du Bassin 2 du Lac Wapizagonke. Ensuite, on est passé sous un pont de béton pratiquement flambant neuf et on a jailli sur le Basssin 3 du Lac Wapizagonke qu'on a traversé avant d'arriver à l'endroit du barrage de castors :



la porte d'entrée pour le Bassin 4 du Lac Wapizagonke, qu'on a aussi traversé à toute blinde en pagayant comme des bâtards. Au bout du lac, une petite plage, remplit des canots des autres êtres humains, nous attendait. On a déposer notre canot Grand-Mère et on s'est mis à grimper, à moitié en cavalant, à moitié en marchant, quoique je n'ai pu résister au plaisir de m'allumer une clope-sacrilège. On a marché et monté des marches en bois et marché et glissé sur des cailloux et on est arrivé à un endroit qui nous proposait de voir un point de vue rétrospéctif. On a dit d'accord :



et on a profité de cette courte pause pour s'asperger de produit anti-mouches à bœuf, puis on a repris le chemin et longé un genre de lac/marécage :


croisé une mini-chute


et on est arrivé au sommet des chutes Waber que votre correspondant français en direct des Amériques a prudemment traversé


Je me suis retrouvé sur un gros rocher auquel était accroché un sapin mort mais j'ai vu la chute vue-du-dessus et j'ai un peu flippé ( j'ai le vertige) et j'ai fait demi-tour, rejoint Bonnita qui m'attendait et nous avons descendu un immense escalier en bois auto-clave ( c'est à dire traité avec du cuivre ( c'est le bois verdâtre que l'on voit dans n'importe quel parc, même en France ) pour finalement voir ça :



qui est aussi l'endroit où tous les autres êtres humains que nous avions laissé passer devant nous prennent leur pause déjeuner, mais ça, on ne voulait pas vraiment le savoir, alors on s'est baigné sous la chute vite-fait :



et on a regardé l'eau s'écouler sur les rochers :



et c'était bon. Après la baignade, j'ai mangé une banane et Bonnita a un peu lézardé et puis on est reparti en reprenant le chemin qui mène vers le Lac Anticagamac et on a finit par déjeuner par-dessus lui ( le Lac Anticagamac) en le regardant de haut :



On a mangé un peu de pain, du jambon, de la trampouille aux fines herbes, des abricots secs, et nous avons bu de l'eau. Après le combat de boxe de Vendredi soir où certaines filles ont combattus contre d'autres filles, Bonnita a dit qu'elle voulait se muscler les bras, alors elle a ramassé des cailloux et nous avons repris la route au pas de course ( je ne m'explique pas vraiment cette frénésie ( la fin de l'hiver ?), Bonnita devant, musclant ses bras en soulevant ses cailloux, et moi derrière, musclant je ne sais quoi.

Finalement, on a retrouvé notre canot jaune et j'ai pagayé pendant que Bonnita Troccoli bronzait


et derrière nous ça ressemblait à ça


Puis Bonnita Troccoli a repris la rame


et j'ai photographié le soleil dans l'eau


et derrière nous ça ressemblait à ça



Comme on avait encore un peu de temps avant de rendre le canot, nous avons fait une halte sur une plage qui est aussi un endroit officiel de camping sauvage.

On s'est baigné



On a glandé au soleil en photographiant le canot Grand-Mère


et le paysage



Puis on est reparti et, à la toute fin de notre jolie promenade, pendant un quart de seconde, quelque chose est devenu véritablement surnaturel :



L'Auberge du Trappeur a l'avantage d'être située pratiquement à la sortie du Parc de la Mauricie et on n'as eu que quelques kilomètres à faire pour débarquer là-bas, vers 19 heures, moi pieds nu et en short-jogging et Bonnita en jupe et en tee-shirt. Nous avons d'abord inspecté le parking de l'Auberge du Trappeur en partant dans des directions opposées. Sur la droite, deux autres voitures de location gris métallisé, ainsi qu'un énorme bus marron, comme un bus qui sert aux tournées de groupe de musique, comme le bus de Robbie Williams, dont la marque semblait être le mot Encore. Sur la gauche du parking, au pied d'un totem, Bonnita Troccoli a lu un petit panneau d'information qui servait de préambule à l'entrée du parc des Tipis. Avant de rentrer dans la grande maison en rodin de bois qui servait d'accueil à l'auberge, elle m'a signalé que je ne pourrais pas fumer dans le Tipi pour des raisons de sécurité-incendie et à cause des nombreuses écorces de bouleau très inflammables qui traînaient un peu partout sur le campement. On est rentré, on s'est présenté, et la gérante, une femme blonde d'une quarantaine d'année, nous a dit qu'elle nous attendait. On a payé pour notre Tipi et ensuite, elle nous a décrit le réglemment intérieur du campement des Tipis ; on pouvait prendre autant de bois que l'on voulait pour alimenter le feu intérieur de notre Tipi ; on avait droit à une lampe torche ; on pouvait prendre le petit déjeuner ici demain matin ; on n'avait pas le droit du fumer sur le campement. Et elle s'est mise à nous décrire les attractions ( pendant ce temps-là, on regardais les boucles d'oreilles en dent de renards, les cartes postales sépia de photos d'amérindiens, les attrapes-cauchemars suspendus au mur, les bracelets en griffe d'ours et les boucles d'oreilles en plumes d'oiseau) : on pouvait choisir de se lever à 5h30 du matin pour aller voir un orignal sauvage, moyennant la somme de 75$ chacun, ou alors, on pouvait visiter le musée d'histoire amérindienne dont faisait partie le parc à Tipi dans lequel nous nous apprêtions à dormir, moyennant la somme de 20 $ par personne ( mais elle a bien précisé que nous n'avions pas le droit d'aller visiter le musée sans payer, même si, littéralement, nous dormions dans le musée), ou alors, on pouvait aussi choisir d'aller se promener quand nous le voulions en empruntant le sentier récréo-touristique qui part de l'auberge, mais qui ne fait pas partie du Parc de la Mauricie. On a dit d'accord. Elle nous a montré la réserve de bois, sise dans un grand Tipi rose, et puis notre Tipi personnel, qui était marron, très grand et très peu photogénique depuis l'intérieur :



On lui a demandé s'il était possible de manger quelque chose, ce soir, à l'Auberge du Trappeur, mais elle nous a dit que les cuisines étaient fermées et que nous devrions plutôt nous rendre au restaurant où nous avons pris notre dernier petit déjeuner avant de quitter la civilisation. Arrivés là-bas, on a commandé une pizza au peperoni et au fromage et partagé une bière pendant le temps de cuisson. Je suis sorti fumer une clope et j'ai encore vu deux chiens obscènes :


dont un qui semblait particulièrement fourbe



Une fois la pizza cuite, nous sommes repartis en Pontiac gris métallisé pour faire un Pizza-Tipi. Bonnita a été prendre une douche, j'ai allumé un feu et j'ai mis la pizza à côté du feu pour qu'elle ne refroidisse pas :



Je pensais que le Tipi évacuerait facilement la fumée mais non, il s'agit de rester au plus près du sol s'il on veut pouvoir respirer correctement. Mais la fumée chasse les moustiques. En revenant de sa douche, Bonnita Troccoli m'a dit : " Nan mais c'est quoi ces conneries d'interdiction de fumer alors que tu peux faire un feu en plein milieu de ton Tipi ? " et j'ai dit "c'est clair " et je me suis roulé une clope. Ensuite on a mangé notre pizza, joué à Grand Chef Ours qui vient sauver Petite Squaw, Bonnita a pris le feu en photo :


et puis on s'est endormi.

Le lendemain on pris un petit déjeuner, un bol de céréales pour Bonnita et des œufs pour moi. Des français ( il n'y avait que des français dans cette auberge) qui avaient été voir l'orignal à 5h du matin sont revenus de leur expédition sans avoir vu le moindre orignal. Vu que nous n'avions vu personne qui ressemblait de près ou de loin à un amérindien, on s'est demandé si les propriétaire de l'Auberge du Trappeur était des amérindiens. On s'est dit que si ce n'était pas le cas, les propriétaires de cette Auberge à la con, avec leurs attractions couillones et super chères, du genre voir (peut-être) un orignal pour 75$, on s'est dit que ces propriétaires-là se faisaient du fric sur le dos des amérindiens si jamais aucun d'entre-eux n'était amérindiens. Je me suis dit peut-être que les constructeurs de Tipi étaient amérindiens mais je n'en sais foutre rien ; Bonnita a plus ou moins visité le musée sans payer et on s'est arraché de là en vitesse pour aller plonger dans le lac le plus proche qui était beau mais dont la seule plage accéssible était presque sous un pont :


Nous sommes finalement repartis sans trop savoir où aller et nous avons roulé en suivant " la route des rivières ", et en espérant tomber sur un lac et une plage où glander avant de rentrer à Montréal. On a cherché pendant deux heures, mais tout les lacs que nous croisions étaient privatisés de fait par les maisons construites tout autour. Aucun chemin publique ne menait aux lacs. Nous avons aussi croisé plusieurs guirlandes successives de motards, des grappes de dix, vingt, trente motards, qui pouvaient être aussi bien de dangereux Hell's Angels que des beaufs qui font de la moto, ou bien les deux à la fois ( nous avons aussi remarqué que beaucoup d'entre eux continuent à porter des casques en forme de casques de l'armée allemande, reprenant les provocations nazies des premiers Hell's Angels, sans peut-être même le savoir). Au bout d'un moment, on était un peu découragé par l'étrange inaccessibilité des lacs comparé à leur non moins étrange profusion dans une " nature incontournable " :




Et puis nous avons vu un panneau " Pourvoirie du Lac Blanc" et nous avons pris une route de terre sans savoir ce que voulait dire pourvoirie :


croisé un lac où les sapins sont morts



et nous sommes arrivés sur la plage d'un genre d'hôtel de luxe perdu dans la forêt. Les femmes qui travaillaient dans cet hôtel étaient vraiment cool, adorables, et lorsque je leur ai demandé s'il fallait payer pour se baigner, elles m'ont dit bien-sûr-que-non-profitez-en-pour-nous avec un air chaleureux qui m'a donné envie d'être leur copain. Il y avait des fauteuils en plastique marron et un hydravion amarré à un ponton. Nous nous sommes jetés dans l'eau et nous avons nagé et puis nous sommes revenus sur la plage et nous avons séché et puis nous nous sommes à nouveau baignés et ainsi de suite pendant tout l'après-midi. Bonnita Troccoli a continué à se muscler les bras en soulevant des cailloux :


et puis elle a fait quelque étirements avec cailloux



et sans cailloux



et puis on vu un très beau papillon



L'hydravion a décollé



Plusieurs mouches noires nous ont mordu** et j'ai pris des pédalos-jaunes en photo


Une famille en rade



Et vers quatre heures et demie, on est reparti.

Sur la route, on a croisé un panneau qui indiquait


et un genre de Ferme Géante qui ressemblait presque à un HLM



En arrivant à Montréal, il faisait 38 degrés, et il allait faire 38 degrés pendant trois jours, alors j'ai mis une jupe de Bonnita et j'ai décidé d'écrire au Premier Ministre du Canada pour lui faire part d'une idée que j'avais eu au moment où l'on cherchait un lac :

Monsieur le Premier Ministre du Canada Stephen Harper,

Bonjour. Je m'appelle Gwyneth Bison et j'accompagne actuellement ma femme Bonnita Troccoli dans son séjour prolongé, son stage, dans cette belle province ( Québec) de votre beau pays ( le Canada). Tous les deux, nous sommes français, et donc quelque part, comme le veut la coutume populaire, vos cousins. Bonnita Troccoli est ici depuis quelque chose comme six mois et moi-même, j'ai déjà passé ≈ quatre mois ici. Nous avons eu le temps de visiter le nord de votre pays en nous rendant à Tadoussac pour fêter le nouvel an, l'Est de votre pays en nous rendant au Motel de la Montagne, proche du Mont Orford, et nous avons également longé plusieurs fois les berges du Saint-Laurent en utilisant l'autoroute qui part de Montréal une fois que l'on a traversé le pont Jacques Cartier et enjambé " le Monstre", la plus grande montagne russe en bois du monde.

Bref, au cours de nos multiples promenades, nous avons pu remarquer que votre grand et beau pays possédait un nombre de lacs tout à fait impressionnant. Nous avons également appris que ce nombre de lacs est tel que vous aviez décidé d'arrêter de les compter et, conséquemment, d'arrêter de les nommer. Nous aimerions, par la présente, vous proposer de reprendre ce travail car nous pensons qu'il n'est pas bon pour votre pays de laisser tant et tant d'inconnus géographique flotter dans l'inconscient collectif Canadien. C'est un peu notre manière de rendre au Canada tout ce qu'il nous a apporté au cours des six derniers mois. Nous revenons tout juste du Parc à Maurice, dans les Laurentides, et nous pouvons donc dire que nous avons acquis là-bas une certaine expérience en Lacs et en Parcs Naturels. Notre proposition sera fondée sur cette expérience, bien plus que sur une vague idée générale de ce qu'est La Nature. Nous avons payé de notre corps pour acquérir cette expérience et pour tout dire, on se gratte encore les morsures de mouches à bœuf. Voici donc une ébauche pour une modeste proposition de noms pour des lacs sans noms :

Proposition de Noms pour des Lacs sans Noms

Lac Équipement
Lac VTT
Lac Roller
Lac Sac de Couchage
Lac Hydravion
Lac Crème Solaire
Lac Mouche à Bœuf
Lac Lampe Torche
Lac Magne-toi le Cul On va Être en Retard Pour Rendre le Canot Grand-mère
Lac C'est Beau
Lac C'est Grand
Lac Encore un Lac
Lac Tapis de Sol
Lac Recyclage
Lac Informations aux Visiteurs
Lac Pédalo-Jaune
Lac Douce Aventure
Lac Activités Éducatives
Lac Conservation
Lac Divulgation Proactive
Lac Visiteurs Curieux
Lac Gps
Lac Sac à Dos
Lac Couteau Suisse
Lac Carte
Lac Sportifs Alertes
Lac Ultra-léger
Lac T-shirt Wendy
Lac des Sandales Allemandes
Lac Ça me Gratte
Lac Velcro
Lac du Sapin Mort
Lac Gore-tex
Lac Dynamo
...

Vous pouvez utiliser ces noms comme bon vous semble, nous ne sommes pas des adeptes de la propriété intellectuelle. Nous nous tiendrons à votre disposition si vous souhaitez recevoir plus de noms pour des lacs sans noms ( soit dit en passant, il semble que le monde moderne regorge de possibilités encore inexploitées et nous sommes tout à fait disposés à prendre la tête d'un Groupe de Recherche pour Nommer les Lacs Sans Noms ( GRNLN ) dans la limite de nos disponibilités respectives et selon l'envergure du salaire proposé pour animer un tel groupe).

cordialement,
Sincerly Yours,

Gwyneth Bison&Bonnita Troccoli

et je n'ai rien foutu d'autres que de lire un genre de livre surpuissant qui m'a envoyé en l'air pendant ces deux jours d'intense canicule où il n'était pas conseillé de sortir, de marcher, de faire autre chose que d'attendre que la chaleur passe en se grattant les restes de morsures de mouche à bœuf, jusqu'à ce que la pluie pointe son nez en craquant d'un tonnerre électrique, comme dans une putain de pub tahïti douche, et que les oiseaux s'excitent, que les insectes s'excitent, que les feuilles des peupliers, qui déjà commençaient à devenir jaune, s'excitent, et que, tous ensemble, nous souhaitions que cette pluie ne s'arrête jamais, qu'elle s'intensifie, qu'elle s'augmente en grossissant elle-même ses gouttes, qu'elle affirme toute sa puissance humide afin que le maudit fleuve Saint-Laurent reprenne enfin son niveau d'eau habituel et arrête de nous faire des frayeurs climatiques avec ses bancs de sable anormaux en cette saison et son air rachitique de fleuve de fin d'été affiché à la fin du mois de mai.

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* La deuxième ruée vers l'or, celle du Klondike, a été beaucoup moins meurtrière que la première, celle de Californie, en grande partie grâce à la police Canadienne qui ne laissait passer personne sans une tonne de matériel. Cette règle des une-tonne-de-matériel a permis à beaucoup d'imprudents mal préparés de ne pas mourir en ne participant tout simplement pas à cette grande arnaque de Ruée vers l'Or2. Je me suis dit que la prévenance du garde-champêtre était sûrement un héritage, un vieux reste, de cette histoire.

** les mouches noires mordent, elles ne piquent pas.